La Consoude, une plante nitrophile
Publié le Par: MAXIME
Précisons que cet article n’est pas vraiment écrit pour les jardiniers mais plutôt pour les agriculteurs et pour l’administration.

Au jardin, si on cultive en pensant biodiversité, permaculture et paillage il est facile d’apporter grâce à la matière organique la quantité d’éléments nutritifs nécessaires à la consoude.
Au champ c’est plus difficile.
La consoude est une plante nitrophile c’est-à-dire qu’elle aime les sols riches (voire très riches) en azote.
S’il y a trop d’azote dans le sol les plantes nitrophiles se développent beaucoup au détriment des autres plantes ce qui provoque une diminution de la biodiversité.
Parmi les plantes nitrophiles appelées aussi nitrophytes on trouve en plus de la consoude, l’ortie, le pissenlit, l’oseille, le gaillet gratteron… on dénombre environ 200 plantes nitrophiles.
Les énormes besoins de la consoude en azote posent des problèmes en agriculture
En effet les législations française et européenne imposent de limiter les apports d’azote à 170 kg par hectare et par an. Si on respecte cette règlementation il est très difficile de cultiver la consoude et nous en savons quelque chose !
Au début de production la consoude puise dans le sol tout ce dont elle a besoin. Mais il ne faut pas oublier que la consoude est une plante pérenne ! On l’installe pour de très nombreuses années.
Quand elle aura prélevé tout ce qui existe dans la profondeur du sol il faudra lui apporter de la nourriture et c’est là que le bât blesse !
Avec un apport de 170 kg d’azote par hectare et par an le rendement de votre champ de consoude sera faible et vous verrez apparaître de très nombreuses mauvaises herbes. Dans le jardin le désherbage de la consoude est rarement un frein, par contre sur de grandes surfaces, c’est la galère. Au bout de 10 ans la consoude est « sale », il faut désherber et de plus votre production sera faible : c’est la double punition !
Calcul des besoins en azote d’un champ de consoude

Premier point à prendre en compte la consoude est une borraginacée, ce n’est pas une légumineuse et donc elle ne capte pas l’azote contenue dans l’air.
Notre objectif est de donner suffisamment de nourriture à la consoude pour qu’elle étouffe les mauvaises herbes !
C’est tout à fait possible. Dans un jardin au sol très riche, nous avons vu la consoude se développer tellement qu’elle avait étouffé le rumex !
Nous pensons aujourd’hui qu’une des solutions est de planter « plus dense » et de bien nourrir la plante.
Nous préconisons donc une plantation à 50 cm sur 50 cm ce qui fait 40 000 pieds de consoude par hectare.
L’objectif poursuivi est d’obtenir un rendement d’au moins 30 tonnes de matière sèche par hectare avec une teneur en protéine de 30% (en dehors de la première année où ce taux est un peu plus faible)
Comme nous fauchons régulièrement la consoude (par exemple 5 fois par an) la culture exporte 30*0,30 = 9 tonnes de protéines par hectare et par an.
Toute la production étant exportée (fauche régulière de la consoude) nous réalisons donc des calculs simplifiés.
Calculons donc les besoins d’apport d’azote pour obtenir cette production
Il nous faut convertir les exports de protéines en besoin d’azote.
1 kilo de protéine contient 156 g d'azote, 1 tonne de protéines contient 156 kg d’azote et 9 tonnes de protéines contiennent 9*156 = 1400 Kg d’azote
On peut faire le calcul inverse et dire qu’un kilo d’azote se trouve dans 6,38 kg de protéines En fonction de nos objectifs de rendement nous pouvons calculer les apports nécessaires en azote.
Rendement en tonnes de MS par ha | Taux de protéines | Export de protéines en kg par ha et par an | Export d'azote par ha et par an |
---|---|---|---|
10 | 0,3 | 3000 | 470 |
15 | 0,3 | 4500 | 705 |
20 | 0,3 | 6000 | 940 |
25 | 0,3 | 7500 | 1176 |
30 | 0,3 | 9000 | 1411 |
Calcul du rendement d’un champ de consoude
Notre objectif premier est de résoudre nos problèmes de désherbage. Cet objectif se transforme en souhait d’obtenir un rendement de 30 tonnes de matière sèche par hectare avec une teneur en protéine de 30%
Nous préconisons une plantation de 40000 pieds par hectare.
Le taux de matière sèche dépend de nombreux facteurs mais il est en général de 85%
Un rendement de 30 tonnes de MS par hectare correspond à un rendement en matière verte de 200 Tonnes par an (c’est un rendement très facile à obtenir en cas d’apport d’une alimentation suffisante)
Ceci correspond à 5 kg de feuille verte par pied de consoude soit 1 kg par pied et par coupe (si nous réalisons 5 coupes)
Notre exportation est donc simple à calculer 30 tonnes à 30% de protéines soit 9000 kg de protéines et donc 1400 kg d’azote nécessaire chaque année. beaucoup plus que ce qui est autorisé par les textes.
Si nous reprenons le calcul dans l’autre sens en apportant 170 unités d’azote par an la production maximum possible est de 3,6 tonnes de matière sèche.
Ce calcul est bien sûr théorique, il ne tient pas compte de nombreux autres facteurs mais le calcul est exact sur une longue période et la consoude est pérenne et donc en place pour une génération au moins.
Avec un export de 3,6 tonnes de consoude séchée par hectare les problèmes de désherbage deviennent quasi insurmontables sur une longue période pour une culture en bio (sans désherbant chimique).

Comment apporter de tels apports d’azote à la consoude ?
Avouez qu’il serait absurde d’apporter de l’engrais chimique pour cultiver une plante qui sert elle-même d’engrais. Nous pensons donc que la fertilisation de la consoude peut se faire principalement en paillage ou grâce à des apports de compost (voire pour les cultures importantes par les boues de station d’épuration.
Prenons le cas du compost. En général le compost apporte environ 6 kg d’azote par mètre cube.
Pour obtenir un rendement de 30 tonnes de matière sèche par hectare il faudrait apporter 1400 Kg d’azote chaque année.
Cet apport peut se faire en apportant environ 200 à 230 mètre cube de compost par hectare et par an.
La consoude : une solution pour traiter les boues de station d’épuration
Les problèmes du traitement des boues de station d’épuration est une des difficultés de notre civilisation actuelle.
Nous pensons que l’utilisation des plantes nitrophile et en particulier de la consoude peut devenir une solution écologiquement intéressante. Notons que la consoude a des racines pivotantes qui rentrent très profondément dans le sol et que de ce fait le lessivage de l’azote est impossible !
Comment utiliser ces données au jardin ?
D’abord le problème du désherbage n’est pas un véritable problème dans votre jardin. Il n’est pas trop difficile de désherber manuellement quelques mètres carrés
Si vous souhaitez produire beaucoup de feuilles de consoude il va vous falloir donner à boire et à manger à votre consoude.
Si vous souhaitez apporter du compost (de ville) vous apporterez 0,2 mètre cube de compost pour 10 mètres carrés de consoude.
Vous pouvez aussi régler le problème en paillant votre consoude par exemple avec des mauvaises herbes. Si votre paillage est très sec avec un rapport C/N élevé vous pourrez avoir temporairement un problème de soif d’azote que vous pourrez régler en urinant une fois tous les 15 jours sur chaque pied de consoude.